Christian Comelli a quelque chose d’un navigateur solitaire qui sillonne une
mer intérieure et nous invite à le suivre jusque dans les méandres les plus
secrets des fleuves qu’il remonte. Ces fleuves de la conscience sont obscurs,
presque toujours souterrains et fascinants.
Certains nous entraînent au coeur des brasiers secrets que l’être alimente au
plus profond de lui sans le savoir. Nous en avons connu qui menaient
jusqu’au néant. L’artiste refusait à la toile l’éclat d’une seule braise. Puis la
lumière a émergé. Doucement. Parfois, elle a encore de la peine à exister.
Ici, elle se fraye un chemin difficile dans l'épaisseur d'une matière
proliférante. Là, elle s’engouffre dans un interstice et éclate en une gerbe
fulgurante, à peine retenue. Là encore, elle occupe la quasi totalité du
champ, s’impose dans un triomphe de soleil couchant ou dans le futilement
sombre d’une beauté de lave tiède. Sur telle ou telle toile, le fleuve souterrain
jaillit à l’air libre, abandonne derrière lui les limons épais et ténébreux. La
toile autorise la respiration, laisse circuler le souffle et l’espace.
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