L’artiste est un « homme de laboratoire », un penseur indépendant. C’est en allant traquer dans un coin d’atelier des situations et des vérités improbables, comme l’homme de science, qu’il permet d’atteindre à la connaissance. Sa « conscience sensualiste » de l’être et de l’univers, pour reprendre l’expression de Françoise-Hélène Brou, est sa vraie participation à la spiritualité contemporaine et universelle. Des milliers de gestes apparemment insignifiants, obscurs, désuets pour aboutir à un « point d’incompétence » et de déséquilibre : c’est là sa contribution effective à la découverte de la réalité. Rimbaud l’affirme : «Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens ». L’art plastique est un « creuset de signifiances » qui s’offre au regard. Il convient d’en négocier l’approche comme une promenade en forêt, le cœur ouvert et l’œil rivé sur sa « chair » parfois froide et lointaine. L’œuvre a toutefois cessé d’être un objet de contemplation pour devenir plus noblement un espace de réflexion et méditation. Elle est un voyage au centre de la condition humaine dans ses dimensions physiques, spirituelles et culturelles. L’imaginaire engagé de l’artiste n’apporte aucune réponse immédiate aux préoccupations sociales quotidiennes. Il ambitionne plus sûrement de participer à la modification des systèmes de pensée et de contribuer ainsi à l’évolution des mentalités. Par toute une dynamique essentielle de prises de position, de remises en cause et de négations, l’art revendique son existence : il refuse d’être considéré comme un acte gratuit et ses explorations ne veulent pas rester sans conséquences… autrement dit sans vertus.
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Christian Comelli |
Christian Comelli |